Analyse n°371 de Alexia Thomas - avril 2019
À l’heure où les partis verts réalisent des percées électorales en Belgique, au Luxembourg et dans le sud de l’Allemagne, l’existence du changement climatique ne semble plus poser question. Les "sommets" climatiques européens et internationaux se sont enchaînés depuis la première édition en 1972, à Stockholm. Malgré les engagements politiques et les rapports scientifiques démontrant l’anthropogénisme du réchauffement climatique (dont le rapport Brundtland de 1987 1), les résistances demeurent nombreuses.
En effet, accepter que le changement climatique ne soit pas seulement le résultat des fluctuations "naturelles", mais bien des activités humaines, implique de questionner nos activités et d’en tirer certaines conclusions. "Les changements climatiques anthropiques actuels résultent de l’accumulation de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, qui découle de l’agrégation de milliards de décisions individuelles." 2
Ces remises en question bousculent l’intégralité de notre mode de fonctionnement actuel. La politique de l’autruche peut, alors, s’avérer plus tentante. William Cronon, auteur de Uncommon ground l’explique ainsi :
À une époque où les menaces sur l’environnement physique n’ont jamais été aussi grandes, il peut être tentant de croire que les gens doivent monter les barricades plutôt que de poser des questions abstraites sur la place de l’homme dans la nature. Cependant, sans affronter de telles questions, il sera difficile de savoir quelles barricades monter, et encore plus difficile de persuader un grand nombre de personnes de les monter avec nous. Pour protéger la nature qui nous entoure, nous devons réfléchir longuement à la nature que nous portons dans nos têtes. 3
Accepter que le changement climatique est anthropogénique (= issu de l’activité humaine) entraîne une multitude de re-considérations qui affectent chaque dimension de nos vies (alimentation, habillement, mobilité, logement, partage entre le temps de travail et le temps libre, éducation, procréation, santé...). On s’attardera, ici, sur les résistances au changement. On tentera de comprendre ces réticences, de les décortiquer et de proposer de les surpasser.
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1 G. H. Brundtland, Notre avenir à tous - Rapport Brundtland, Genève : Nations unies, Commission mondiale sur l’Environnement et le Développement, 1987, [en ligne :] https://fr.wikisource.org/wiki/Notre_avenir_à_tous_-_Rapport_Brundtland.
2 S. Wynes, K. A. Nicholas, « The climate mitigation gap : education and government recommendations miss the most effective individual actions », Environmental Research Letters, XII, 7, 12 juillet 2017, [en ligne :] http://iopscience.iop.org/article/10.1088/1748-9326/aa7541/pdf (traduction de l’auteure).
3 W. Cronon, Rethinking the Human Place in Nature, New York : W.W. Norton, 1995, p. 23-56 (traduction de l’auteure).
Sociologue et anthropologue de formation, Alexia Thomas est formatrice au CPCP. Elle a par ailleurs organisé le projet Europe on Track 5 visant à éduquer les jeunes sur le sujet du changement climatique, et ce partout en Europe.