Analyse n°474 de Boris Fronteddu - juillet 2023
Le Pacte vert européen – la stratégie à long terme de l’Union européenne qui vise la neutralité carbone à l’horizon 2050 – devrait s’appuyer sur une "double transition" ; énergétique et numérique. Dans ce cadre, la Commission appelle à relancer l’industrie minière au sein de l’Union européenne ainsi qu’à mettre la main sur de nouvelles sources d’approvisionnement en matières premières critiques. Cette volonté politique répond à un double constat : la demande en métaux dans le cadre de la double transition est appelée à exploser et l’Europe ne produit qu’une part infime des métaux nécessaires à la double transition.
L’idée d’une « immatérialité » du numérique entretenue notamment par des concepts tels que le cloud (sorte de « nuage » où seraient stockées les données) et les plateformes de streaming, semble tenace. La croissance effrénée de l’empire numérique, l’accumulation et le stockage exponentiel de données au cours des dernières décennies tend à renforcer l’image d’un monde virtuel illimité auquel aucune restriction physique ne pourrait être opposée. Néanmoins, la matérialité du numérique a déjà fait l’objet de nombreuses recherches et publications. Et pour cause, celle-ci se décline d’innombrables façons. Citons par exemple : la démultiplication des terminaux utilisateurs, le développement des infrastructure afférentes, l’accumulation des e-déchets, la consommation énergétique directe et indirecte du secteur, les émissions de gaz à effet de serre et la pollution liés à la fabrication et à l’utilisation des objets numériques…
Cette analyse s’intéresse à la consommation de métaux dans le cadre de la "double transition" du pacte vert européen et aux conséquences environnementales de ce qui s’apparente à une fuite en avant extractiviste. Bien que peu probable dans un futur proche, un retour de l’activité minière en Belgique n’apparaît plus, aujourd’hui, relever de la science-fiction. Dans le même temps, à plus de 10 000 kilomètres de ses frontières, la Belgique se penche sur une potentielle exploitation minière en eaux profondes. Si certains promoteurs de l’industrie minière affirment qu’il s’agit d’une solution pour s’approvisionner en métaux nécessaires à la double transition, il s’agirait d’un dépassement de frontière inédite dans l’exploitation des ressources naturelles. Jusqu’où sera-t-on prêt à descendre au nom de la "double transition" ?
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Boris Fronteddu est chargé de recherche dans la thématique Consommation durable, au sein du pôle Recherche & Plaidoyer. Il est titulaire d’un master en journalisme ainsi que d’un master en politiques européennes.