Analyse n°372 de Jérôme Vanstalle - avril 2019
L’euroscepticisme suppose un rejet de l’intégration européenne, au profit de l’État-nation. Il s’agit d’une mouvance politique désormais bien installée à travers l’Union européenne (UE), et bénéficiant d’une popularité croissante. À l’occasion des élections européennes de mai 2019, les partis eurosceptiques pourraient obtenir, ensemble, plus de 150 sièges au Parlement européen, soit plus que le score supposé de l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates (S&D).1 Pour autant, l’aile droite des eurosceptiques est, aujourd’hui, séparée en trois groupes parlementaires peu homogènes et dont l’absence de discipline de vote les empêche d’avoir un véritable impact sur le travail de l’assemblée parlementaire européenne. D’autres partis eurosceptiques sont plus isolés encore, notamment au sein de la gauche radicale ou de l’extrême droite. C’est probablement dans cette logique que, à l’été 2018, Matteo Salvini, ministre italien de l’Intérieur, et Marine Le Pen, députée de l’Assemblée nationale française et présidente du Rassemblement national, annonçaient vouloir créer un « Front de la Liberté ». Pour ces deux figures de proue de l’euroscepticisme et du nationalisme, l’heure serait à la constitution d’une alliance des nationalistes qui passerait aussi par la construction d’un programme commun pour les trois décennies à venir…2
Cette démarche peut interpeler à plusieurs égards. Premièrement, n’est-il pas paradoxal que des nationalistes issus de deux pays différents s’unissent et œuvrent à constituer un programme commun, eux qui sont supposés exalter la singularité de leurs nations respectives ? En seraient-ils même capables ? Et, dans l’affirmative, pourraient-ils encore être qualifiés d’eurosceptiques ?
La question de la coopération transnationale entre eurosceptiques n’est pas nouvelle, mais cette problématique semble aujourd’hui particulièrement importante pour ceux-ci, qui pourraient figurer parmi les principaux gagnants du scrutin prochain mais dont la désunion pourrait leur infliger un camouflet. Cette publication vise donc à comprendre comment, et avec quelles implications, les eurosceptiques de tous bords pourraient faire preuve d’unité dans la diversité 3. Avant toute chose, il échoit cependant de revenir sur la définition de l’euroscepticisme et sur la relation entre celui-ci et le nationalisme.
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1 M. Buisson, "La vague populiste ne submergerait pas le Parlement", Le Soir, 19 février 2019, p. 10.
2 O. Tosseri, "Salvini et Le Pen lancent le 'Front de la liberté'", Les Echos, 8 octobre 2018, [en ligne :] https://www.lesechos.fr/08/10/2018/lesechos.fr/0302372444864_salviniet-le-pen-lancent-le---front-de-la-liberte--.htm, consulté le 19 mars 2019.
3 Devise de l’Union européenne.
Jérôme Vanstalle est titulaire d’un master en sciences politiques et responsable du pôle Formation du CPCP.