Analyse n°422 de Clara Van Der Steen - décembre 2020
Il est difficile de ne pas citer Simone de Beauvoir dans le contexte actuel, car si la crise sanitaire témoigne de certaines inégalités présentes au sein de la société, elle les exacerbe également. L’extrait de la philosophe prend tout son sens lorsque l’on analyse les avancées sur les plans politique et social en cette période. Les situations de crises – en particulier à une échelle internationale comme celle de la Covid-19 – sont souvent l’occasion de restreindre les libertés individuelles, en renforçant les pouvoirs déjà en place. Par conséquent, l’analyse des impacts du confinement en Belgique, qui eut lieu de mars à juin 2020, sur les rapports de genre permet d’établir un premier diagnostic sur leur évolution, durant cette crise sanitaire.2
La pandémie de la Covid-19 a entraîné de nombreux changements sociétaux aux niveaux économique, social et politique ainsi que la réadaptation systématique des différents secteurs touchés. Le confinement dévoile comment les acteurs sociaux sont affectés par ces restructurations et identifie lesquels sont considérés comme indispensables pour maintenir le système en état de marche. En effet, les nouvelles priorités sociétales réquisitionnent les professionnels des milieux considérés comme essentiels (médical, alimentaire, de distribution ou d’entretien) à leur poste, tandis qu’une autre partie de la population est désormais confinée chez elle. Les conséquences en termes de genre sont immédiates ; plusieurs experts se sont déjà penchés sur la question et ont admis que les femmes étaient majoritaires dans les secteurs jugés essentiels pendant le confinement. Les effets négatifs, que cette période de trouble a suscités, peuvent être examinés dans le but de révéler les inégalités, mais aussi de réévaluer le rôle de l’état dans l’exercice de ses fonctions.
Que ce soit à travers l’isolement des femmes ou leur triple journée de travail, cet article revient plus en détail sur les inégalités creusées par la crise sanitaire. Dans cette optique, plusieurs paramètres sont à considérer. Dans un premier temps, l’investissement des femmes dans les tâches de première nécessité, le travail effectué gratuitement et le rôle de chaque individu au sein du foyer sont des arguments favorables à l’idée que la société dépend en majorité du travail féminin. Dans un second temps, les rapports de domination envers les femmes s’exacerbent sous de multiples facettes ; il est en particulier question, dans cet article, de la violence domestique, de la réappropriation de l’espace public par les hommes et du contrôle permanent sur le corps des femmes. Dans un dernier temps, il faut considérer un élément supplémentaire dans l’évolution des rapports de genre ; à savoir que le confinement est un moment clé dans la prise de conscience des inégalités en vigueur dans notre société.
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2 Nous parlons ici en termes de rapport de genre pour identifier les individus considérés femmes et hommes. Cependant, nous sommes conscients que le genre dépasse cette dichotomie consensuelle. Par ailleurs, la crise sanitaire n’a pas été favorable pour repenser cette binarité mais elle semble plutôt l’avoir renforcée. Dans une optique de facilité de lecture, nous maintenons l’appellation homme femme pour catégoriser les individus.
Clara Van Der Steen est titulaire d’un master en Archéologie et Histoire de l’art (ULB) ainsi que d’un master en spécialisation en étude de Genre (UCL). Elle travaille au sein du pôle Recherche & Plaidoyer au sein de Citoyenneté & Participation.