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Justice sociale, justice environnementale

La convergence des luttes dans la pratique de l’éducation permanente

Analyse n°413 de Solène Houzé - juin 2020


S’il y a bien une affirmation sur laquelle tout le monde peut s’accorder en 2020, c’est que la dernière décennie aura été fort marquée par des mouvements de contestation de toutes sortes. Combats féministes, grèves, manifestations et mouvements à l’échelle nationale, marches pour le climat, contre les violences policières, contre les discriminations, les citoyens et citoyennes n’hésitent plus à faire entendre leur voix, que ce soit sur les réseaux sociaux ou dans la rue. Que réclament-ils ? Entre autres, plus d’égalité, de démocratie, de transparence et d’actions de la part des politiciens et aussi, plus de justice.
Ainsi, les concepts de justice sociale et environnementale sont de plus en plus présents dans le paysage médiatique et politique. Si la tendance était au départ de les traiter comme deux problématiques séparées, les contestations de ces dernières années ont révélé que les thématiques de l’écologie et du social ne sont pas si éloignées que ça. Le mouvement des gilets jaunes a d’ailleurs permis de révéler des liens profonds entre actions écologiques et actions sociales. Le message est clair : la lutte contre le dérèglement climatique ne se fera pas sans une lutte contre les inégalités socio-économiques.1 Si les différentes contestations ont permis de faire émerger un début d’alliance entre les acteurs sociaux et environnementaux, de multiples pressions sociétales continuent de vouloir opposer les deux problématiques. Il est grand temps de renforcer cette alliance en rappelant les logiques qui sous-tendent la convergence des luttes du XXIe siècle et d’en faire une priorité dans le travail de notre association, pour la transition et pour la société en général.
En 2018, Dounia Tadli 2 analysait le manque de convergence et de coopération sur le terrain entre les mouvements de Transition, adeptes de la sobriété volontaire et ceux de lutte contre la pauvreté. Leurs objectifs sont pourtant les mêmes : une société plus juste, plus solidaire, une plus grande utilisation des ressources locales, l’importance des liens sociaux, une viabilité écologique de la consommation, etc. Pourtant, les mouvements de Transition restent trop souvent le lieu de rencontre de personnes au capital culturel et économique plus élevé. Face à ce constat, le Centre Permanent pour la Citoyenneté et la Participation souhaite tout mettre en œuvre pour adresser des réponses à cet enjeu d’accessibilité des alternatives de transition à tout citoyen ou groupe de citoyens désireux de découvrir ou d’agir à son échelle sur les problématiques de consommation durable.
La transition vers une société plus juste et durable ne peut pas exclure les publics en situation de précarité. Elle se doit d’être obligatoirement solidaire. Si nous allons encore plus loin, nous affirmons même que la transition ne se fera pas sans eux. Cette analyse veut donc poser les cadres théoriques de ce rapprochement entre combats sociaux et environnementaux, en commençant par définir les concepts de justice sociale et environnementale et en développant les liens existants entre les deux mouvements. Sur le terrain, dans nos groupes en éducation permanente, il existe un réel besoin de pistes concrètes pour aborder la question environnementale en lien avec les enjeux socio-économiques que connaissent les publics en situation de précarité.
Nous proposons des pistes de réflexion et des leviers d’action pour répondre à ce besoin. La première partie se penchera sur la théorie de la convergence des luttes environnementales et sociales en parcourant l’historique des différents mouvements et en analysant l’apport de la crise des gilets jaunes dans cette problématique. La seconde présentera le projet transversal du CPCP qui se penchera sur la question de l’accessibilité aux mouvements de transition pour des publics plus précarisés, en collaboration avec le Réseau Transition.
Elle abordera également la redéfinition de problématiques en éducation relative à l’environnement par la prise en compte des enjeux sociaux.

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1 G. d’Allens, "Les Gilets Jaunes ont forcé la mue sociale du mouvement écologiste", Reporterre.net, 16 novembre 2019, [en ligne :] https://reporterre.net/Les-Gilets-jaunes-ont-force-la-mue-sociale-du-mouvement-ecologiste, consulté le 6 mai 2020.
2 Dounia Tadli est une ancienne chercheuse du Centre Permanent pour la Citoyenneté et la Participation. Elle a écrit plusieurs articles proposant une analyse transversale sur différents sujets de consommation durable : l’alimentation et les rapports de genre, l’antispécisme, la consommation de viande, l’alimentation low-cost, etc. Pour consulter ses analyses, voir http://www.cpcp.be/publications.


Solène Houzé est chercheuse au CPCP. Elle est titulaire d’un master en agroécologie.

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