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Les transferts des allocations familiales et de soins de santé

Étude n°14 de Citoyenneté & Participation - juin 2013


L’accord institutionnel conclu en octobre dernier prévoit le transfert de compétences importantes aux Communautés en matière de soins de santé et d’aide aux personnes. Ces matières transférées représentent un montant total de plus de 4 milliards d’euros, soit un sixième du budget des soins de santé. Ce budget dépasse largement l’ampleur des quelques compétences de santé qui sont déjà aux mains des entités fédérées, en termes de prévention, d’institutions de repos ou de soins, ou de soins à domicile. L’impact de cette réforme sur l’organisation des soins de santé est par conséquent majeur. L’accord institutionnel prévoit également un transfert de l’ensemble des allocations familiales, qui représentent 6 milliards d’euros. Au total, ce sont des compétences de 10 milliards d’euros qui sont transférées aux Communautés, soit pour ces seules compétences une augmentation de près de 20% de leur budget.

Les Communautés seront désormais compétentes pour la gestion et l’octroi des allocations familiales. Celles-ci constituent un élément fondamental de solidarité dans notre pays. De solidarité entre les personnes qui ont des enfants et celles qui n’en ont pas. De solidarité également entre les différents niveaux de revenus, puisque des cotisations différentes payées proportionnellement au revenu permettent de bénéficier de mêmes prestations.

Les allocations familiales constituent souvent un élément substantiel du revenu des familles. Cette aide financière permet de répondre à des besoins liés à l’éducation des enfants, aux soins à leur apporter, à leur habillement, aux multiples petites dépenses liées aux besoins quotidiens ou ponctuels des enfants. Mais plus largement, pour toutes les familles, les allocations familiales sont un soutien à la parentalité. Elles sont la reconnaissance que la société souhaite apporter à ceux qui, tous les jours, accompagnent leur enfant à grandir, apprendre, découvrir. Elles sont un soutien continu dont les parents ont besoin. Dans ce cadre, les allocations familiales sont avant tout une contribution pour permettre à chaque enfant de disposer des ressources nécessaires à son épanouissement.

Le transfert des allocations familiales aux Communautés constitue une nouvelle étape dans les transferts de compétences. En effet, il s’agit pour la première fois du transfert d’une branche entière provenant de la sécurité sociale, transférée dans son entièreté aux entités fédérées.

Notre système de soins de santé se distingue aujourd’hui par sa qualité, son efficacité et son accessibilité : pas ou peu de listes d’attente, une grande proximité, un haut niveau de formation du personnel soignant… Dans notre pays, il ne faut pas montrer patte blanche pour se faire soigner et les techniques de pointe sont utilisées pour l’ensemble des patients. Ce sont les besoins des patients qui déterminent les techniques utilisées, et non leur niveau de revenu.

Indépendamment de la réforme de l’État, notre système de soins de santé fait face à de nouveaux défis. Le vieillissement de la population, et la forte augmentation de la population de plus de 80 ans qui va s’observer durant les prochaines années, impliquent une transformation du type de soins demandés : davantage de maladies chroniques, davantage de lieux de séjour de longue durée… Par ailleurs, les dépenses réalisées dans le secteur des soins de santé sont en constante augmentation, et leur croissance est plus importante que celle du PIB. L’inégalité d’accès aux soins de santé reste importante, induite par les coûts à charge du patient et par la montée en puissance de services commerciaux, venus compenser le manque d’offre dans certains segments (comme les maisons de repos).

Dans ce contexte, les nouveaux transferts de compétences accentuent encore les défis auxquels est confrontée l’organisation des soins. Dans le domaine des soins de santé, les compétences transférées touchent de nombreux secteurs : les maisons de repos, le soutien à la première ligne, les investissements dans les infrastructures hospitalières, la santé mentale, les centres de revalidation, etc. Le type de compétence transféré varie d’un secteur à l’autre : coûts de fonctionnement (en partie ou intégralement), coûts d’investissement, coûts de coordination, normes d’agrément…

Ces compétences concernent pour une large part les personnes âgées. Or, avec le vieillissement de la population, le transfert de ces compétences se traduit inévitablement par un transfert de charge vers les Communautés. Pris isolément, certains postes ont connu une forte croissance ces dernières années, bien au-delà de la croissance moyenne des dépenses en soins de santé. Ainsi, les dépenses pour les maisons de repos ont augmenté de 7,6% entre 2003 et 2010. Fondu le budget de l’assurance maladie, cette croissance pouvait être compensée par une stabilisation d’autres postes budgétaires. Demain, la poursuite de tels rythmes de croissance va se confronter aux moyens plus limités dont bénéficieront les Communautés.

Ces transferts de compétences posent par conséquent de multiples défis aux Communautés amenées à les gérer à l’avenir. Nous tenterons dans cet article de les détailler et de décrire les mécanismes financiers qui permettront de les financer à l’avenir. Nous tracerons enfin des pistes de solution pour l’avenir. Les auteurs remercient Pauline Loeckx et Olivier Gillis pour leur contribution à cette rédaction.

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